Embouteillage au sommet
Chacun son tour ! Mais j'étais là avant le monsieur !
Il fut un temps ou l’Everest n’était pas une fille facile. C’était pourtant pas les prétendants qui manquaient, mais rien à faire, même le beau Mallory s’y fit éconduire poliment. Il faut dire qu’elle ne manquait pas de charme à l’époque, la reine de l’Himalaya, avec son joli manteau blanc et ses belles pentes encore vierges. Et puis un jour, elle a craqué… elle a fini par dire oui à deux jeunes et beaux alpinistes qui lui courraient après depuis quelques temps. Et elle a aimé ça !
Elle a tellement aimé ça qu’elle en a redemandé ! Une deuxième fois quelques années plus tard, puis une troisième, une quatrième… et puis c’est parti en vrille… c’est devenu une addiction avec tous les travers que cela engendre: prostitution, trafic d’oxygène, règlements de comptes… et sur ses beaux glaciers, on trouve aujourd’hui surtout des bidonvilles surpeuplés… la faute à qui ? A des maquereaux sans scrupule qui vendent ses charmes pour quelques valises de dollars… résultat, tous les alpinistes du monde lui sont passés dessus !
Ralf Dujmovits: « je ne peux pas croire ce que je vois »
C’est ainsi que le 19 mai 2012, l’Everest a touché le fond… ce jour-là, 234 personnes ont atteint le sommet ! La faute à une météo peu clémente qui, cette année-là, ne laissa pas une grande fenêtre de beau temps. Du coup, quand le soleil a pointé le bout se son nez, ils sont tous sortis de leur tente pour se précipiter vers le sommet comme d’autres sur les promotions dans les supermarchés. Au ressaut Hillary, c’était comme chez Ikea un samedi après-midi en période de Noël ! Sauf que là, quand t’en as marre d’attendre, tu peux pas rentrer chez toi… Bilan: quatre morts. L’histoire ne dit pas si une file prioritaire avait été aménagée pour les femmes enceintes.
Mais il n’y avait pas que des touristes ce jour-là sur le versant Népalais de l’Everest, il y avait aussi de vrais alpinistes. Parmi eux, se trouvait par exemple l’allemand Ralf Dujmovits, seizième homme à réussir le challenge des quatorze 8 000. Une pointure ! Il avait déjà gravi l’Everest en 1992 mais il souhaitait cette fois-ci, tenter l’ascension sans oxygène. Et lorsque, contraint de faire demi-tour en raison d’une vilaine sinusite, il arriva aux abords du camp III, il eut bien du mal à en croire ses yeux. Une gigantesque colonie de grimpeurs s’élançait en file indienne vers le sommet comme des fourmis vers un morceaux de sucre abandonné. Le fait d’être témoin privilégié de cette mascarade dissipa rapidement la déception liée à son échec et il ne lui fallut pas longtemps pour immortaliser cet instant pathétique en un cliché qui allait immédiatement se répandre dans les médias comme une trainée de poudre. La légende de l’Everest ne s’arrête jamais…
Photo: Ralf Dujmovits
Retrouvez l’interview de Ralf Dujmovits sur le site outsideonline.com.
1 Commentaire
guillaume - 8 mars 2018 à 10 h 18 min
Le problème c’est que tu rends hilarants des trucs pathétiques, alors après, du coup, nous, et bein on reveut des trucs pathétiques.
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