Everest

Du mythe à la décharge publique

Ah ! l’Everest ! Théâtre des rêves les plus fous, des exploits les plus incroyables, des records les plus improbables… mais aussi de drames, de controverses et d’embouteillages… longtemps inviolée, imaginée, fantasmée, la plus haute montagne du monde n’est plus aujourd’hui qu’un ridicule parc d’attraction pour touristes pleins aux as, qui s’entassent devant le ressaut Hillary comme d’autres s’agglutinent dans les supermarchés le samedi après-midi. Mont Everest et mont Saint Michel: même combat ! A quand le télépéage ?

En même temps, il parait que, par beau temps, la vue depuis le sommet vaut le détour. Mais il faut, dans la mesure du possible, se concentrer sur l’horizon parce que si on regarde un peu plus bas, on y voit surtout des cadavres et des déchets… d’après les spécialistes (c’est à dire ceux dont le compagnon de cordée s’est effondré sous leurs yeux), il faut au moins dix gaillards pour redescendre un alpiniste en difficulté dans la zone de la mort. « Au dessus de 8000 mètres, on peut considérer que c’est comme si on est sur la lune, impossible d’être secouru. » disait Rob Hall avant de s’en rendre compte par lui même… Il en faut sûrement un peu moins pour pousser un corps au fond d’une crevasse mais il n’empêche que bon nombre de malchanceux trainent toujours leurs restes sur les pentes du toit du monde… Il y a même ce bon vieux « Green boots » qui sert à baliser la piste. Si c’est pas malheureux… et je ne vous parle pas des innombrables bouteilles d’oxygène, cacas congelés et détritus en tout genre… non, vraiment, c’est d’un goût… En 2010, une poignée de volontaires ont entrepris d’essayer de remettre un peu d’ordre dans la montagne en ramenant quelques tonnes de déchets et un ou deux cadavres, c’est vous dire où on en est… Sir Hillary doit se retourner dans sa tombe…

Je crache un peu dans la soupe, c’est vrai… Parce que l’Everest c’est quand même un peu mon fond de commerce. Il s’en est passé des choses là-haut ! 8 848 mètres d’anecdotes invraisemblables ! Une montagne de livres ! Combien de films, de documentaires, de reportages… un régal pour un mec comme moi ! Et c’est pas fini ! Un jour viendra où le téléphérique qui mènera au sommet se décrochera, emportant avec lui des millions de touristes ébahis…

Premier au sommet de l’Everest : Mallory, Hillary ou les deux ?

Mais revenons à nos yaks. Il existe principalement deux façons d’accéder au sommet: par la face nord du côté Tibétain et par la face sud via le versant Népalais. C’est un peu plus facile par le sud mais les autorisations du gouvernement Népalais ayant un peu tardé à venir, pas mal d’explorateur se sont cassé les dents avant qu’en 1953, bien aidée par les progrès des masques à oxygène, l’expédition anglaise dirigée par John Hunt n’atteigne officiellement le Graal avec Tenzing Norgay et Edmund Hillary, héros éternels. Je dis officiellement parce qu’en 1924, un duo (déjà britannique) composé de George Mallory et Andrew Irvine avait enflammé les piliers de bar de l’époque en flirtant avec le sommet depuis la face Nord. La légende dit même qu’ils l’auraient peut-être atteint mais même la découverte des restes congelés de Mallory en 1999 n’a jamais permis de l’affirmer…

Par le versant Népalais, l’ascension débute par le franchissement incertain de la cascade de glace du Khumbu, que les « Ice fall doctors » auront préalablement équipée avec des échelles en aluminium afin que les clients traversent les passages les plus ardus comme dans un fauteuil. Puis, après une nuit de rêve dans une chambre cinq étoiles au camp 1, vient ensuite l’ascension de la combe Ouest qui mène au camp 2, à 6 500 mètres. De là, débute la montée de la face du Lhotse vers le camp 3 où les cordes fixes vous aideront à passer un agréable moment en notre compagnie malgré des températures parfois un peu fraiches le matin. Après avoir franchi « l’Éperon des Genevois » et la « Bande jaune », vous serez accueillis au col sud par nos hôtesses en combinaison violette et à l’hygiène douteuse pour passer une nuit fraiche et aérée dans une de nos tentes tout confort spécialement aménagées pour l’occasion. Vous pourrez ensuite, si le temps n’est pas trop pourri, vous lancer à l’assaut du sommet distant d’environ dix à douze heures pour un bon marcheur. Attention tout de même au ressaut Hillary qui, situé non loin du sommet, pourrait vous jouer un mauvais tour en cas de coup de bambou…

Par le côté Tibétain, les grimpeurs auront la chance de visiter six camps d’altitude répartis sur la montagne. Après être passés par le glacier de Rongbuk, puis le col Nord, ils pourront, s’il leur reste des forces, lancer leur assaut vers le sommet depuis le camp 6, en passant par les trois fameux ressauts (step1, step 2 et step 3) qui constituent les principales difficultés de l’ascension finale.

L’Everest et la course aux records

Une fois le sommet défloré, l’Everest a connu une période de calme d’une dizaine d’années avant que ne se déclenche la « Everestmania » et le cirque des expéditions commerciales. Et si le légendaire Reinhold Messner a incontestablement marqué la montagne de son empreinte en réussissant la première sans oxygène (avec Peter Habeler) en 1978 puis la première en solo deux ans plus tard, la course aux records qui s’ensuivit a rapidement tourné au ridicule (qui a même tué de façon assez régulière) : le plus jeune, le plus vieux, le plus grand, le plus rapide, le plus handicapé, le plus con, le plus chien…

Et puis est venu le temps des drames… il y a d’abord eu certainement la tragédie la plus célèbre de l’alpinisme moderne, quand, en 1996, Rob Hall, Scott Fischer et consort se prirent les pieds dans le tapis après avoir atteint le sommet. Mais le pire était à venir avec une première avalanche meurtrière dans la cascade de glace en 2014 (16 morts) puis une deuxième en 2015 au camp de base surpeuplé, faisant pas moins de 18 victimes. Comme si par moment la montagne avait envie de dire stop…

Everest, face nord
La face nord de l’Everest, celle des premières tentatives d’ascensions

2 Commentaires

  • Champeau Antoine - 8 août 2017 à 12 h 43 min

    Certains sherpas disent que la montagne Sagarmatha en a marre d’être violée sans cesse et se venge de temps en temps, peut être y’a t il un fond de vérité là dedans…

  • Champeau Antoine - 27 août 2017 à 10 h 05 min

    Est-il possible de faire un don à une association qui nettoie l’Everest ? je trouve dégueu de polluer ainsi une montagne qui vous accueille et se laisse grimper…l’Everest concentre deux idées : la sublimation de l’alpinisme et l’horreur de l’âme humaine…non ?

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