Les grandes dates de l’Histoire de l’alpinisme

30 novembre 2017 - 9 commentaires

Entre la première de Moïse au mont Sinaï et le solo intégral d’Alex Honnold à El Capitan, l’Histoire de l’alpinisme nous a offert quelques heures qu’il serait bon de ne pas oublier. Puisse cet article à l’exhaustivité subjective nous aider dans cette mission capitale. Et puisque le plus beau reste à venir, on laisse un peu de place à la fin pour les futures mises à jour.


Troisième jour : Équipé de ses célèbres sandales (ancêtres des PA), Moïse grimpe en solo au sommet du mont Sinaï (2 285 mètres) pour y rencontrer Dieu. Il en revient avec les Tables de la Loi et une belle invention : l’alpinisme.

26 juin 1492 : Sur ordre du roi Charles VIII, Antoine de Ville part à la montagne et grimpe jusqu’au sommet du mont Aiguille (2 087 mètres) avec son équipe. C’est la première ascension importante dans l’Histoire de l’alpinisme.

8 août 1786 : Quoi de neuf docteur ? Le toubib chamoniard Michel Paccard et son guide Jacques Balmat atteignent le sommet du mont Blanc.

14 juillet 1808 : D’abord soutenue puis trainée et finalement portée par ses deux guides, Marie Paradis est la première femme au sommet du mont Blanc. Henriette d’Angeville sera la première à atteindre le sommet by fair means et en robe le 3 septembre 1838.

20 août 1820 : Le docteur Hamel était venu au mont Blanc pour en mesurer la hauteur, il aurait mieux fait d’en mesurer les risques. Suite à son entêtement, une avalanche emporte les guides Pierre Balmat, Pierre Carrier et Auguste Tairraz qui sont les victimes de la première tragédie en montagne

24 juillet 1821 : Une délibération du conseil communal de Chamonix proposant une liste de guides patentés et un règlement, pose les jalons de ce qui deviendra la célèbre Compagnie des Guides de Chamonix. Le pouvoir royal Sarde affine le projet et actera légalement l’organisation de la Compagnie le 9 mai 1823

14 juillet 1865 : Première du Cervin par Edward Whymper, Lord Francis Douglas, Charles Hudson, Douglas Hadow, Michel Croz et deux guides de Zermatt, Peter Taugwalder père et fils. Mais l’âge d’or de l’alpinisme se termine en queue de poisson lorsque la descente vire à la tragédie avec la fameuse glissade de Hadow qui entraine Douglas, Hudson et Croz dans sa chute.

16 août 1877 : Première ascension de la Meije par Emmanuel Boileau de Castelnau et ses guides Pierre Gaspard et fils.

22 décembre 1919 : Première assemblée générale du Groupe de Haute Montagne, le fameux GHM qui aujourd’hui encore rassemble l’élite mondiale de l’alpinisme (et des archives à la valeur inestimable).

18 mars 1923 : En réponse à un journaliste du New York Times qui lui demandait pourquoi il voulait tant gravir l’Everest, George Mallory offre à l’assistance la répartie la plus célèbre de l’Histoire de l’alpinisme : « Parce qu’il est là ! »

8 juin 1924 : George Mallory et Andrew Irvine sont aperçus pour la dernière fois progressant sur l’arête nord-est de l’Everest. Ont-ils atteint le sommet ? Mystère… En attendant, l’Everest, lui, est toujours là…

1er août 1931 : Probablement motivés par la victoire d’Antonin Magne sur le Tour de France, deux frangins partent de Munich à vélo et roulent jusqu’au sommet du Cervin pour réussir la première très convoitée de la face nord. Maillot à pois pour Toni et Franz Schmid !

24 juillet 1938 : Anderl Heckmair, Ludwig Vörg, Heinrich Harrer et Fritz Kasparek sont les premiers à gravir la face nord de l’Eiger. Le Führer est aux anges : « Ein Volk, ein Reich, ein Eiger ! »

6 août 1938 : Première de l’éperon Walker en face nord des Grandes Jorasses par Riccardo Cassin et ses deux compagnons de cordée Gino Esposito et Ugo Tizzoni. Mussolini n’en pense pas moins.

22 février 1941 : Premier de cordée, roman mythique de Roger Frison-Roche, paraît sous forme de feuilleton dans la « Dépêche Algérienne ». Il sera publié chez l’éditeur grenoblois Arthaud en 1942.

17 (avec Edouard Frendo) la seconde ascension de la Walker. Il deviendra plus tard le premier homme à avoir gravi les trois grandes faces nord des Alpes : Eiger, Cervin et Grandes Jorasses.

3 juin 1950 : Maurice Herzog atteint le sommet de l’Annapurna, premier 8 000. « Moi aussi j’y étais » clame Louis Lachenal. Mais personne ne l’entend…

1er février 1952 : Lionel Terray et Guido Magnone réussissent la première du Fitz Roy en Patagonie. En hiver ? Oui mais dans l’hémisphère sud. En été donc.

29 mai 1953 : Première de l’Everest par Edmund Hillary et Tenzing Norgay. Ça c’est fait.

3 juillet 1953 : L’époque est à la lourde expédition nationale mais Hermann Buhl ne mange pas de ce pain rassis. N’en déplaise aux bourrins, il s’offre un solo légendaire et la première du Nanga Parbat.

25 février 1954 : Une bande de prolétaires parisiens (dont Robert Paragot et Lucien Bérardini) sacrifient quelques phalanges pour s’offrir la première de la face sud de l’Aconcagua.

31 juillet 1954 : Une bande de scélérats italiens (dont Lino Lacedelli et Achille Compagnoni) sacrifient les phalanges de Bonatti pour s’offrir la première du K2.

22 août 1955 : Après six jours d’ascension en solitaire qui lui permettent de ruminer le K2 (d’où il est finalement revenu indemne), Walter Bonatti vient à bout du pilier sud-ouest des Drus.

3 janvier 1957 : Le Commandant Legall met un terme à la spectaculaire opération de secours de Jean Vincendon et François Henry. « Plus jamais ça » s’indigne la vallée de Chamonix qui s’organise alors pour créer des secours en montagne dignes de ce nom.

12 novembre 1958 : En quarante-sept jours d’escalade répartis sur dix-sept mois, une brute nommée Warren Harding réussit la première ascension de la paroi d’El Capitan dans le Yosemite. Deux ans plus tard, un poète nommé Royal Robbins répète l’ascension en une semaine avec son cercle d’amis : Chuck Pratt, Tom Frost et Joe Fitschen.

: Première très controversée du Cerro Torre par l’Italien Cesare Maestri et l’Autrichien Toni Egger (qui trouvera la mort à la descente). Nous sommes en 2017 et Maestri n’a toujours pas avoué.

22 mai 1963 : Tom Hornbein et Willi Unsoeld réussissent l’ascension de l’Everest via l’arête ouest et celui qui deviendra ensuite le couloir Hornbein. C’est la première fois qu’un 8 000 est gravi autrement que par sa voie normale.

2 mai 1964 : Quatorze ans après Herzog et Lachenal, une armada chinoise (195 grimpeurs au camp de base !) conquiert le Shishapangma, quatorzième et dernier 8 000. Depuis, un buste de Mao se les gèle là-haut.

22 février 1965 : Première hivernale en solitaire de la face nord du Cervin par Walter Bonatti qui, sur ce dernier coup d’éclat et à seulement 35 ans, met un terme à sa carrière de Grand Alpiniste. Merci patron !

27 mai 1970 : Première de la face sud de l’Annapurna par une expédition britannique dirigée par Chris Bonington.

28 juin 1970 : Au Nanga Parbat, l’alpiniste tyrolien Reinhold Messner gravit son premier 8 000 (son frère Günther disparait à la descente). Ça valait bien un livre.

16 mai 1975 : La japonaise Junko Tabei est la première femme au sommet de l’Everest. Suivront le premier amputé, le premier Ouzbek, le premier avec un pantalon bleu… puis le deuxième amputé, le deuxième Ouzbek, etc.

8 mai 1978 : Reinhold Messner et Peter Habeler parviennent au sommet de l’Everest sans oxygène. Messner en tire un livre.

17 février 1980 : A l’Everest, première ascension hivernale d’un sommet de plus de 8 000 mètres par une expédition polonaise. C’est Leszek Cichy et Krzysztof Wielicki qui sont au sommet. Tous les récits s’accordent à dire qu’il n’y faisait pas très chaud.

20 août 1980 : Messner encore. Cette fois, c’est l’ascension de l’Everest en solitaire. Il en profite pour publier son cinquantième livre.

30 juin 1982 : Christophe Profit décoiffe bon nombre d’observateurs en effectuant l’ascension de la Directe Américaine aux Drus en solo intégral.

16 octobre 1986 : En atteignant le sommet du Lhotse, Reinhold Messner devient le premier homme à avoir gravi les quatorze 8000 (l’occasion de publier son 1 500ème livre). Il devance le Polonais Jerzy Kukuczka qui bouclera le challenge l’année suivante. Le Suisse Erhard Loretan complétera le podium en 1995.

10 mai 1996 : Une violente tempête et un enchainement de mauvaises décisions entrainent une terrible tragédie sur les pentes de l’Everest. Bilan : huit morts dont les célèbres guides Rob Hall et Scott Fischer, précurseurs des expéditions commerciales en Himalaya. A propos d’expédition commerciale, Jon Krakauer en tirera un best-seller : Tragédie à l’Everest.

30 juin 2005 : Un éboulement aux Drus raye le pilier Bonatti de la carte.

17 mai 2010 : L’alpiniste espagnole Edurn Pasaban devient la première femme à gravir les quatorze 8000 après son succès au Shishapangma. La Sud-Coréenne Oh Eun-sun avait revendiqué l’exploit quelques semaines plus tôt mais d’après Elizabeth Hawley à qui on ne la fait pas, plusieurs de ses ascensions sont du pipeau. L’autrichienne Gerlinde Kaltenbrunner mettra tout le monde d’accord l’année suivante en réussissant le challenge sans utiliser d’oxygène.

13 septembre 2011 : Mort de Walter Bonatti à 81 ans. Messner glisse un petit bouquin au passage.

28 octobre 2015 : Naissance de summit-day.com

26 février 2016 : Alex Txikon, Ali Sadpara et Simone Moro gravissent le Nanga Parbat en hiver. Le K2 devient le seul 8000 jamais gravi en hiver.

3 juin 2017 : Le grimpeur américain Alex Honnold réussit la première ascension d’El Capitan en solo intégral. Je répète : El Capitan en solo intégral !

A suivre…

 

Moise, style alpin au mont Sinaï
Alpine style au Sinaï.

9 Commentaires

  • Goubeau - 30 novembre 2017 à 9 h 54 min

    Extra! On s’est bien marré ce matin en vous lisant. Une petite erreur…1501eme bouquin pour Messner !!! On apprécie vraiment votre humour et chacune de vos publications est un régal ! Merci ! À la prochaine !

  • thomas - 30 novembre 2017 à 10 h 59 min

    A propos des bouquins de Messner, Michel Mestre a écrit un article fascinant sur le sujet : « Établir une liste exhaustive de ses livres relève de la gageure, tant l’auteur est prolifique et sa stratégie d’édition complexe ». C’est ici https://babel.revues.org/677

  • Ballu - 30 novembre 2017 à 10 h 05 min

    Excellent !

  • Pierre Marie Girardot - 30 novembre 2017 à 11 h 31 min

    Pas mal vu pour le « fondateur » de l’alpinisme. Et vous oubliez aussi l’ascension du Mont Thabor par Jésus et trois de ses apôtres. Même si la Mont Thabor n’est pas vraiment une montagne le point de vue qu’on a d’en haut vaut la peine. Il est aussi question du sermon sur la montagne … Apparemment il aurait été prononcé près du lac de Tibériade et pour le coup une simple surélévation, une colline, qui elle aussi vaut le détour mais n’est pas une montagne. Ce qui est intéressant dans les deux cas c’est que le mot « montagne » prend une dimension spirituelle à souligner. J’ai écrit un article où cette dimension est bien présente avec des têtes d’affiche comme Herzog, Lachenal, Meissner, Joë Simpson, Bonatti … Les grands alpinistes fréquentent aussi les grandes hauteurs spirituelles… Ils cherchent peut-être « Dieu par la face Nord » … J’emprunte le titre d’un livre qui n’a rien à voir avec la montagne sinon dans son titre et encore moins avec Dieu… Merci pour ce nouveu (comme toujours !) très bon article. J’apprécie d’autant plus que , modeste alpiniste pour ma part, je crois savoir que vous aimez mieux comtempler la montagne d’en bas et à travers les livres. … A propos vous n’avez jamais songé à compiler vos articles pour en faire un vrai livre ?

  • Pierre Marie Girardot - 30 novembre 2017 à 11 h 41 min

    … Suite
    Vous en avez déjà parlé mais la tragédie Henry & Vincendon aurait sa place avec les événements de 1821 et 1919. Et quelques semaines avant la disparition de l’immense Walter Bonatti, le Grand Dru se casse une nouvelle fois la gueule … Dur dur pour Walter. Il est parti refaire sa voie dans un monde meilleur !

  • Paul - 30 novembre 2017 à 11 h 51 min

    et Hannibal qui passe les Alpes ?

  • Jean François Malès - 30 novembre 2017 à 13 h 14 min

    Chaque nouvel article est un régal.J’adore votre humour.Quand on aime la montagne vous lire est le meilleur des anxiolytiques.Bravo!

  • Willy - 30 novembre 2017 à 19 h 15 min

    Pas mal. Le prochain nom qui rentre doit se faire le k2 en hiver. Minimum

  • thomas - 30 novembre 2017 à 22 h 12 min

    Et mon petit doigt me dit qu’il sera polonais ! A moins que Walter…

Flux RSS pour les commentaires de cet article.

Laisser un commentaire