Jerzy Kukuczka
Yurek, le yéti des Tatras
Si on voulait caricaturer un peu, on pourrait dire que Jerzy Kukuczka était un alpiniste « à l’ancienne ». Du matos pourri, des permis d’ascension pas toujours en règle, des travaux de peinture acrobatiques pour financer ses expéditions et pourtant, un des plus grands himalayistes de l’histoire.
Entre 1979 et 1987, Yurek pour les intimes, a gravi les quatorze 8000 de la planète. Reinhold Messner en était venu à bout le premier mais il lui avait fallu seize ans. Kukuczka boucla l’affaire en huit ans, à la polonaise : parfois en hiver, souvent par des nouvelles voies, toujours en costaud. C’est dans l’univers hostile des Tatras, ce massif montagneux à cheval entre la Pologne et la Slovaquie, qu’il a fait ses premières armes face la rigueur de l’hiver en montagne mais c’est bien l’Himalaya qui a fait sa légende.
Le Lhotse, premier et dernier 8000
Son premier 8000, c’est le Lhotse, comme un symbole, puisque c’est aussi là qu’il trouvera la mort en 1989 dans sa terrible face sud, victime d’une chute et d’une corde trop fragile*. En 1980, on lui propose de participer à la première hivernale sur l’Everest avec Krzysztof Wielicki mais il préfère assister à la naissance de son fils. Il se rattrapera dès le printemps en étant le premier à gravir l’Everest via le pilier sud, sans oxygène, cela va de soit ! Il formera ensuite une redoutable cordée avec Voytek Kurtyka qui l’accompagnera au sommet du Makalu, du Broad Peak et des deux Gasherbrum en 1983.
A partir de 1985, Yurek accélère le rythme. Un 8000 par an ça ne suffit pas. Il en veut plus ! Il commence donc à s’attaquer aux géants himalayens en hiver. Il en gravira deux rien que pour l’hiver 85 : Dhaulagiri et Cho Oyu. Au printemps, c’est le Nanga Parbat qui tombe. Trois 8000 en un an, la machine est lancée et elle va très vite ! Heureusement pour Messner, au même moment, il compte déjà dix 8000 à son palmarès. Kukuczka ne pourra pas le rattraper…
Quatorze 8000 dont quatre en hiver
Il réussit pourtant trois nouveaux sommets l’année suivante : le Kangch’, le K2 et le Manaslu. Cette année-là, terrible, le K2 tuera treize alpinistes mais pas Jerzy Kukuczka qui restera pourtant marqué à vie par la disparition de son compagnon de cordée Tadeusz Piotrowski. En 1987, il réussit la première hivernale à l’Annapurna avec Artur Hajzer puis, le 18 septembre, il est au sommet du Shishapangma, son dernier 8000. La boucle est bouclée, Messner a eu chaud aux fesses !
* De nombreux comptes rendus ont fait état d’une corde usée et bon marché mais Ryszard Pawlowski, son compagnon de cordée, a toujours prétendu qu’elle était neuve et en parfait état (source : Libres comme l’air – Bernadette McDonald).
Jurek au sommet du Manaslu. Photo tirée du film que Jerzy Porebski a consacré au célèbre alpiniste polonais et dont la bande-annonce est disponible sur Dailymotion : « Kukuczka ».
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